C'est la première fois que je poste mes textes non yaoi sur internet et personne à part Heathen ne les a lus ^^
J'espère qu'ils vous plairont (si vous les lisez
). N'hésitez pas à laisser des commentaires
Celle ci s'appelle Oh, the Guilt et c'est une petite nouvelle ^^
OH, THE GUILT
Journée éprouvante. Je rentre du boulot fourbue. Vendeuse dans un magasin de fringues branché de la ville. Toute la journée passée à écouter ce que veulent les clientes. Ou les clients. Et à dire "oui, madame, cet ensemble vous va à ravir". Même si c'est pas vrai, même si ça la boudine, il faut toujours dire ce que le client a envie d'entendre, ce qui le poussera à acheter le vêtement qu'il a essayé.
J'ouvre la porte de l'appartement, et mon mari apparaît et me sourit.
- Bonjour ma chérie! La journée s'est bien passée?
- Ah, une horreur. Enfin, je suis habituée.
Je l'embrasse par habitude. On mange ensemble par habitude. Il me pose des questions sur ma journée par habitude. On regarde un peu la télé, puis on fait l'amour. Par habitude...
Sauf que depuis un mois, cette habitude est teintée d'une culpabilité qui me ronge comme de l'acide. Chaque fois que je regarde mon mari, un poids me tombe sur le coeur. Quand je l'embrasse, c'est par habitude. Quand je fais l'amour avec lui, je pense à un autre. Femme doublement infidèle: par l'esprit et par le corps. C'est que je suis amoureuse d'un autre homme. Il s'appelle Bastien, il est adorable. Je ne peux penser qu'à lui tout le temps. Parfois il passe me voir dans la boutique, et chaque fois, ma journée est éclairée. Des étoiles s'allument dans mes yeux et il me manque à la seconde même où il part.
Mais si chaque journée où il vient me voir est une bénédiction, chaque soirée, chaque nuit est un cauchemar de culpabilité. Je fais de plus en plus semblant d'avoir la migraine. Un après-midi, alors que Bastien vient de passer me voir, j'appelle mon mari pour lui dire que je ne rentrerai pas ce soir, parce que je vais dormir chez une amie que je n'ai plus vu depuis des siècles. Mon mari n'est pas du tout méfiant.
- Amuse-toi bien, sourit-il.
Tout serait sans doute plus facile si nous étions un couple comme il y en a tellement, brisés par la routine, la lassitude, dont le mari n'est plus amoureux de la femme, et la femme n'est plus amoureuse du mari. Mais mon mari est amoureux de moi. Et ça me gêne horriblement.
Pourtant, ça ne m'empêche pas d'apprécier les moments que je passe avec Bastien ce soir-là. Il est tellement adorable, je n'y résiste pas. Dîner aux chandelles et tout et tout. Il est romantique, et gentil, et il a de l'humour, et puis il est tellement beau.
N'empêche que quand je réintègre le foyer familial, la culpabilité est encore plus forte. Je ne peux plus, je ne le supporte plus. Il faut que je dise à mon mari que je suis amoureuse d'un autre homme. Je demande conseil à Bastien d'abord, et il me répond qu'il faut que je fasse comme je le sens, mais que si j'ai besoin d'un abri, la porte de chez lui est ouverte.
Tout au long de la journée qui est sans doute la plus terrifiante de ma vie, je m'efforce de réunir mon courage pour avouer le soir à mon mari l'horrible vérité. Je sens le froid s'insinuer dans mes veines, me glacer les doigts et le coeur, et paralyser mon cerveau. Comme avant un entretien d'embauche, sauf que là, je sais déjà que l'issue sera désastreuse.
Le soir venu, quand je rentre chez moi, mon mari m'accueille avec un grand sourire.
- Bonsoir! Alors, comment s'est passée ta nuit chez ton amie?
- Très bien.
Il s'avance pour m'embrasser, mais je l'évite en regardant ailleurs. Il me regarde d'un air étonné: c'est normal, il ne comprend pas. Je lui prend la main et l'emmène sur le canapé, où je l'oblige à l'asseoir. J'ai très peur, mais il le faut, il le faut, je ne peux pas continuer à le trahir... et impossible de laisser tomber Bastien.
- Je suis amoureuse de quelqu'un d'autre.
La bombe est lâchée, atomique, destructrice. Mon mari me regarde d'un air hébété, comme s'il n'avait pas saisi le sens de ma phrase. Il reste silencieux un très long moment, bouche bée, puis enfin il balbutie un mot.
- A... amoureuse? D'un autre...?
- Oui, amoureuse d'un autre homme.
Il ne réagit pas. Il baisse la tête et reste prostré dans son silence, qui est plus insupportable que tous les cris de désespoir du monde. C'est le silence d'un homme qui vient de voir sa vie voler en éclat par une simple petite phrase, pour une grande réalité. Je me sens idiote. J'aurais du lui cacher la vérité. Etant la coupable, j'aurais du supporter le poids de mon adultère, mais en égoïste que je suis, je viens de reporter tout le poids de ce terrible fardeau sur les épaules de mon mari, qui n'avait rien demandé, et surtout, qui ne méritait pas ça.
Puis il prend sa tête dans ses mains et se met à sangloter, et je sens que je me hérisse d'horreur. Lui qui m'a toujours traitée comme si j'étais une reine, qui m'a toujours fait croire que la vie n'en valait la peine que si j'étais à ses côtés, qui m'a toujours aimée, comblée de tendresse, qui a toujours été aux petits soins pour moi, voilà que je viens de détruire sa vie avec mon aveu, le pire des aveux qui soit au monde: coucher avec quelqu'un une fois peut être pardonné, par un mari ouvert, mais être amoureuse de quelqu'un d'autre, c'est l'espoir qui se brise, c'est la fracture, sans une seule possibilité de guérison.
C'est l'horreur. Enfin je pensais que c'était l'horreur. Mais la vraie horreur, c'est d'entendre ce qu'il me dit après, toujours en sanglotant:
- Je... j'aurais du faire un enfant avec toi... tu serais restée. C'est ma faute.
Oui, le pire de tout, c'est d'avoir un mari qui se sent coupable d'avoir une femme adultère.
- Non, c'est moi. Je vais m'en aller.
Je prépare mes affaires dans un sac, alors qu'il est toujours prostré sur le canapé à pleurer, et je sors de l'appartement en silence pour aller me réfugier chez Bastien.
La liberté? Non, ce n'est pas la liberté. J'ai quitté mon mari pour aller avec Bastien, mais je sens que ce terrible sentiment de culpabilité envers l'horreur que je lui ai fait subir ne s'échappera pas de sitôt. Et en conséquence, je sens que mon couple avec Bastien n'est pas aussi épanoui que je l'aurais souhaité. C'est mieux qu'avec mon mari, bien sûr, mais le souvenir de cette rupture douloureuse reste présent, comme une goutte acide de citron sur la langue, comme une fausse note dans une mélodie de Chopin.
Un mois plus tard, alors que mon couple avec l'homme que j'aime subit un blocage que j'attribue toujours à la culpabilité d'avoir quitté mon mari de façon si brutale, je m'aperçois que j'ai un message sur la boîte vocale de mon téléphone portable. C'est mon mari. Il me dit d'une voix fatiguée:
- C'est moi. C'est pour te dire que je t'aime, et que je ne peux pas vivre sans toi. Et comme tu n'es pas là, la déduction n'est pas difficile. Je voulais juste te dire que je t'aime. Adieu.
Paniquée, je me précipite vers mon ancien appartement. Il va tenter de se suicider, mon mari va tenter de se suicider! Le souvenir de notre rencontre, de notre mariage, de nos bons souvenirs me reviennent soudain. Il faut que je l'empêche de faire ça, à tout prix. Mais quand j'arrive, il s'est déjà coupé les veines et son sang se mêle à l'eau du bain. Il n'est pas encore mort, et il me regarde avec des yeux déjà un peu vitreux.
- Nooon! je hurle.
Il sourit un peu en me voyant et murmure un dernier "je t'aime", le dernier de toute sa vie. Je hurle d'horreur. Je hurle sans m'arrêter. Je sors de la salle de bain où il n'y a plus qu'un cadavre. Incapable de laisser mon esprit s'exprimer calmement, je suis les pulsions de mon corps. Je sors la trousse à médicaments, et j'avale tous les médicaments qui se trouvent dedans. Un paquet, et de toutes sortes. L'effet ne se fait pas attendre. Je commence à voir trouble, je transpire, mon cerveau ne transmet plus correctement les données. Je m'écroule sur le carrelage, les membres parcourus de tremblements. Mes pensées s'évaporent. Je réussis à en formuler une dernière. Dommage qu'il aie fallu un double suicide pour me rendre compte de la réalité: finalement, c'était de mon mari que j'étais amoureuse.
FIN.
Jeu 31 Mai - 16:16
:D:D